Julius Schnorr von Carolsfeld (1794-1872), Nibelungen Chanson, 1847, la Mort de Siegfried. Photo: http://www.nibelungen-forum.de, Wikepedia.

Les Burgondes et la Suisse

L’histoire des Burgondes permet aussi de reconstituer un épisode d’importance pour la Suisse. Il y avait deux royaumes entre 443 et 1032.  Elle est unique dans les royaumes barbares au début du Moyen Âge après la chute de l’empire romain.

Les Burgondes

Dans le premier royaume (443-534), les rois travaillèrent à fusionner les Burgondes et les indigènes gaulois et ainsi naquit, même après la chute en 534, un particularisme burgonde et cette identité survécut à la disparation de l’entité politique.

Le nom de la Burgondie a même subsisté jusqu’à aujourd’hui pour désigner une partie de la France.

Le hasard n’y a pas joué un grand rôle, mais la politique des rois burgondes explique bien mieux cette survie, même 91 ans après l’installation des burgondes en 443. Le royaume fut annexé par les rois francs (534).

Mais qui sont les Burgondes ? L’encyclopédiste Pline l’Ancien nomme pour la première fois les Burgondes, un peuple germanique.  Il les situe sur l’Oder, en Pologne actuelle. Il est probable qu’ils vinrent de l’île de Bornholm (aujourd’hui territoire danois) dans la mer Baltique.

Au IIème siècle on les place entre l’Oder et la Vistule. Au cours du siècle suivant, ils vont se diriger vers le sud-ouest.

À la fin du IIIème siècle, les Burgondes s’installent sur le Main, un affluent du Rhin. En 359, les Burgondes s’allient avec les Romains contre les Alamans.

Vers 409, les Burgondes et leur roi entrèrent dans l’Empire romain dans la région de Worms (Allemagne) et ils bénéficièrent du statut de fédérés (foederatus).

Le Royaume

On pourrait considérer cette construction politique comme un royaume, mais c’est après la défaite militaire de 436 et la migration vers le lac Léman qui va assurer la survie des Burgondes – soit depuis 443 – qu’un vrai royaume fut créé.

Ils vont s’y tailler un royaume qui englobera les bassins du Rhône et ses affluents. Les rois s’appliquèrent à assurer l’harmonie et puis la fusion des Burgondes et des indigènes gaulois (ou des indigènes gallo-romains).

Cette histoire commence avec une phrase dans une chronique anonyme de Vème siècle: la Sapaudia est donnée aux débris du peuple burgonde pour être partagée avec les indigènes.

Les indigènes sont les Gaulois ou gallo-romains, les débris du peuple burgonde démontre qu’il s’agit des survivants de la défaite militaire totale de 436.

La Sapaudia

La Sapaudia était constituée du territoire de la cité (une unité administrative déterminée par Rome) de Genève (Genava).

Le mot Sapaudia signifie en celte le “pays des sapins”.

La Sapaudia constituait probablement le grand diocèse de Genève, auquel s’étaient ajoutés les territoires de Nyon et d’Avenches jusqu’au Rhin, une grande partie de la Romandie (le territoire francophone) d’aujourd’hui.

La lente disparation de l’Empire romain (d’occident) entre 454 et 476 permit aux divers peuples germaniques installés en Gaule de s’émanciper et d’établir des royaumes. Les rois burgondes en profitèrent aussi.

Cette première extension des Burgondes détermina l’avenir et la forme de ce royaume et définit le deuxième royaume (888-1032): un domaine intermédiaire entre la Gaule et l’Italie. Les Burgondes  s’emparèrent aussi du bassin du Rhône et de la Saône.

Par la politique des rois burgondes, l’harmonie entre les deux peuples est assurée et une lente fusion entre Burgondes et Gaulois se prépare.

Le particularisme burgonde

C’est probablement au cours des années 500 que se forgea un particularisme burgonde. Les habitants commençaient à se sentir sujets d’un même roi, vivant dans une même entité et dotés d’un destin commun.

La situation internationale était complexe : par la situation religieuse (paganisme, arianisme, église catholique) et la situation ethnique, politique et culturelle (les évêques, les Francs, les Alamans, les Ostrogots, les Wisigoths et d’autres peuples et royaumes).

La chute du royaume burgonde eut lieu en 534, mais jusqu’au traité du Verdun (843) le territoire allait conserver son identité.

Le territoire donne même naissance à plusieurs entités appelées Bourgogne, duché de Bourgogne, comté de Bourgogne et duché de Bourgogne transjurane.

Le deuxième royaume de Bourgogne s’étend de Bâle à la Méditerranée en 1032, date à laquelle il est incorporé au Saint Empire romain.

Le prestige est si grand que le Duc de Bourgogne au XVème siècle s’estimait l’héritier naturel du royaume burgonde.

(Source: J. Favrod, Les Burgondes. Un Royaume oublié au cœur de l’Europe, Lausanne 2011).